Départ 

Cet été-là, au détour d’une conversation simple,

il y a eu un silence plus lourd que les mots.

L’aîné m’a regardée sans détour, avec cette pudeur des grands départs.

Ses yeux disaient ce que ses lèvres n’osaient plus.

— Maman, il faut que je trouve ma route…

 

Dans ce silence, j’ai senti l’odeur du linge rangé, intacte, comme un dernier refuge.

 

— Il ne fuyait pas, il s’émancipait.

Il ne reniait pas, il se libérait.

 

L’adolescent se défaisait du fil invisible qui le reliait à moi,

pour tisser sa propre toile, ailleurs.

 

Je l’ai écouté, le cœur serré, retenant mes larmes comme on retient un navire au port

quand la marée l’appelle.

Je n’ai pas dit : reste.

Je n’ai pas dit : tu me manques déjà.

J’ai seulement murmuré :

 

— Va… mais souviens-toi, la maison ne s’effacera pas derrière toi.

Elle sera toujours là, même fissurée, même silencieuse.